Voir, regarder, observer, contempler : autant de modalités de notre emprise visuelle sur le monde.


Voir est immédiat et ne requiert pas une prise de conscience ; si je ne suis pas aveugle, il me suffit d’ouvrir les yeux pour voir. Mais voir distraitement, ce n’est pas vraiment voir, comme on voit pour la première fois, avec stupeur, crainte ou émerveillement.
« Il y a une naissance simultanée de nos yeux et du monde, un sentiment de « première fois » où ce qui regarde et ce qui est regardé se donnent le jour. » ( Christian Bobin, La présence pure).

Regarder est un voir conscient et intentionnel : je ne regarde que ce qui m’intéresse et cela peut prendre un certain temps. Il peut cependant m’arriver de diriger mon regard vers un point précis comme pour le regarder mais en pensant à autre chose, autrement dit de le regarder distraitement.

Observer, c’est regarder méthodiquement, voire scientifiquement : j’observe ce qui m’intéresse pour mieux le comprendre. Le regard observateur scrute et questionne systématiquement, souvent en multipliant les points de vue. Il est tout à fait impossible d’observer distraitement. D’un point de vue émotionnel, le regard observateur peut être neutre, sévère ou bienveillant.

Contempler, c’est regarder profondément, non en vue d’accroître son savoir mais par-delà la coupure épistémique, pour fusionner avec l’objet de sa contemplation, quel qu’il soit. En état de relaxation, j’en arrive ainsi à me regarder moi-même puis à me contempler, dans une démarche visant à faire  coïncider le moi contemplant et le moi contemplé.

 

Faire confiance

À moi-même : cela dépend surtout du rapport que j’entretiens avec mon propre corps. En effet, le socle de notre confiance en nous-mêmes est psycho-corporel : si j’observe mon corps pour apprendre de lui quels efforts je peux lui demander en toute sécurité, ma confiance en moi grandira. Mais si je lui demande trop ou trop peu, il s’ankylosera ou deviendra douloureux, et ma confiance en moi s’étiolera.
Cette confiance vient de l’intérieur du corps.

À autrui : cela dépend surtout de mes expériences relationnelles passées. Si j’ai pu établir des rapports de confiance avec les personnes qui m’importaient (parents ou autres personnes tutélaires), je devrais jouir d’une bonne capacité à accorder ma confiance. Si au contraire ces personnes ne m’ont pas fait confiance ou que je leur ai fait confiance à mauvais escient, ma capacité à faire confiance est affaiblie.
Cette confiance vient d’abord de l’extérieur, mais sera modulée par un travail intérieur.

À l’avenir : cela dépend surtout de ma décision de lâcher prise dans toutes les situations relationnelles difficiles. Contrairement aux apparences, il ne s’agit pas d’une démission face aux responsabilités professionnelles, sociales ou familiales. Lâcher prise dans un contexte de stress ou de souffrance, c’est reconnaître que la solution n’est pas pour tout de suite et accepter qu’elle intervienne plus tard.
Cette confiance vient de l’intérieur de l’esprit.

 

Comment prendre confiance

Avoir/ /donner/perdre… confiance : Suppose une confiance en forme d’objet susceptible d’être possédé, manipulé ou perdu.


Être en/se sentir en… confiance : Suppose une confiance en forme de manière d’être, d’état intérieur doté de stabilité.


Gagner/ prendre… confiance
 : Suppose une confiance en forme de chemin sur lequel s’engager et progresser ; loin du bien de consommation à acquérir une fois pour toutes en vue d’être heureux.

Comment concilier le lâcher-prise préconisé par la sophrologie, avec le volontarisme lié au désir de progression, notamment dans la prise de confiance ? Pourrions-nous tomber d’accord sur un volontarisme global portant sur l’amélioration de notre vie en général, volontarisme qui encadrerait nos pratiques sophrologiques de lâcher prise ?

 

Quels déclics, quels catalyseurs pour commencer à prendre confiance ?

 

 

Accueillir

Accueillir, recevoir, accepter, laisser venir.

Les visualisations sophrologiques sont presque toujours introduites par l’un de ces termes, impliquant tous une certaine absence de volontarisme, voire une passivité. Mais à les considérer de plus près, des nuances apparaissent, dont le sophrologue aura intérêt à tenir compte en formulant son terpnos logos.

Accueillir : le mot contient cueillir, c’est-à-dire prélever sur le réel (matériel ou imaginaire) de quoi faire son miel (« Cueillez dès aujourd’hui les roses de la vie » Ronsard). Ac-cueillir, (cueillir vers) : mouvement intentionnel, précisément dirigé. C’est toujours l’autre qu’il s’agit d’accueillir : dans la Bible, l’étranger, la veuve ou l’orphelin, auxquels on souhaite la bienvenue, autrement dit dont on bénit la venue ; en sophrologie, la situation qui se présente et se déroule devant le regard intérieur. En accueillant une situation nouvelle, je crée la possibilité de m’approprier son altérité, autrement dit de la rendre moins autre justement. Mais ce moi capable d’apprivoiser une situation née de ma propre conscience, ne dois-je pas l’accueillir lui aussi en tant qu’autre (alter ego), lui faire place dans le jardin de mon être ?

Recevoir : le mot que l’on associe immédiatement à recevoir est cadeau. Le propre du cadeau sophrologique, c’est que je me le fais à moi-même : dans la vivance, je donne et je reçois. On retrouve le dédoublement du moi évoqué pour l’accueil, mais à une nuance logique près : accueillir, c’est d’abord s’ouvrir à l’altérité (et peut-être l’intégrer ensuite) ; recevoir, c’est intégrer ce qui a d’abord été accueilli.

Accepter : recevoir totalement, sans réserve d’aucune sorte, ce qui nous échoit (les cadeaux de la vie comme les coups du destin, soi-même comme autrui). Pour autant, accepter ne signifie pas nécessairement se résigner : en acceptant ce que je suis à l’instant présent, je ne sacralise pas cet instant (et moi avec), j’en prends simplement acte comme d’une étape sur la voie de ma propre amélioration.

Laisser venir : suppose que l’on soit déjà dans l’épokhê, dans la suspension du jugement qui permet à tous les possibles d’advenir. Quand je laisse venir (ce qui se présente à ma conscience), je m’ouvre au futur incertain en faisant confiance à mes ressources. Et si la douleur ou la tristesse sont au rendez-vous, elles ne doivent rien à l’épokhê en tant que telle. Laisser venir en moi des perturbations me semble être la seule façon de les surmonter.

Avant d’accueillir l’autre, m’accueillir moi-même en prêtant attention aux mouvements intérieurs de mon corps (relâchement musculaire, dilatation thoracique et abdominale), à mes sensations et à mes sentiments.
Constater tout ce qui m’arrive, guetter mes perceptions, pointer mes états d’âme.
Si j’en suis capable, creuser en moi jusqu’au noyau, briser la coque qui me résiste.
Et donner de l’air à mes émotions retenues, à mes idées inabouties ; donner du temps à mes projets, à mes amis. Et regarder s’ouvrir au fond de moi l’ouverture elle-même, l’accueil des possibles.

 

Ruth propose au Centre Qee Paris et Qee Boulogne

des rendez vous privés de sophrologie

ainsi que de nombreux ateliers thématiques.